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Archive for mars 2014

« Qui ne sait pas manger, ne sait pas cuisiner » ai-je entendu, je ne sais plus dire quand.

J’ai aussi entendu « tu es ce que tu manges ». Alors depuis quelques temps je ne sais plus trop qui je suis.

Que faire entrer dans ma cuisine pour y prendre la place de tous ces aliments que je dois en sortir pour des raisons sans grand intérêt finalement. Ce qui compte, c’est que je suis en train de ré-apprendre à manger.

Chaque repas, chaque en-cas, chaque envie est une nouvelle invention. L’habitude n’a plus cours dans mon vocabulaire culinaire.

Je m’efforce de ne pas évoquer le mot « sans » alors je me creuse la tête avec le mot « avec ».

Une designer de Hong-Kong m’expliquait récemment qu’une des caractéristiques du design en Asie est le design par le vide, le design négatif en quelque sorte. La forme que l’on recherche émerge du vide laissé par les formes qu’on regarde.

Que vais-je faire émerger avec ce vide laissé dans mon placard? Quelles sont les formes qui vont émerger et que je ne vois pas encore?

Comment faire de la pâtisserie « avec » de la farine de châtaigne, de la fécule de pomme de terre, de la farine d’épeautre, de la farine de pois chiche?

Comment faire un gratin avec du jaune d’oeuf, de la muscade, un fond de bouillon de poulet?

Comment faire des fruits de saison la comfort food par excellence?

Comment trouver « un truc rapide à manger  » entre deux RV lorsque tout ce que je vois autour de moi c’est une boulangerie, un kebab et une pizzeria?

Que faire avec ces envies soudaines de tout ce qui est sorti de ma cuisine? Les faire passer en contrebande, telle la junkie à la volonté pilotée? Relire les bilans, examens et ordonnances pour ré-expliquer le pourquoi à l’enfant de 5 ans que je redeviens parfois? Faire la brave et mépriser ce qui m’échappe, et tous ceux qui en profitent?…Non, rien de tout ça ne me va.

« Lorsque les sociétés évoluent, leurs institutions deviennent caduques » Michel Serres

« Lorsque les régimes alimentaires évoluent, leurs règles deviennent caduques » Linh Lê

Ré-inventer. Re-créer.

Et me poser 4 fois par jour (au moins) : de quoi t’as envie là, en vrai?

J’avoue ces derniers temps, je boude encore un peu. Je me réponds que « de toute façon, vu ce que je peux manger, c’est pas la peine de réfléchir 150 ans ».

Mais parfois, là, au détour d’un rayon de soleil ou d’un étal de marché, me viennent des envies et des idées.

Alors hier, avec des nouilles de soja, du céleri, des champignons de Paris, de l’huile de sésame, quelques crevettes, de la coriandre et de la ciboulette, un citron vert et du nuoc mam, j’ai créé ça :

 

Salade de sensations

 

Donc à la question  » de quoi t’as vraiment envie là? », j’ai répondu :

du croquant, d’où le céleri

de la douceur, d’où l’huile de sésame,

de la fraîcheur, d’où le citron vert et les herbes

de la tendresse, d’où les champignons

puis des protéines (doctor’s prescription) d’où les vermicelles et les crevettes.

Les enseignements de ma cuisine me sauvent souvent la mise ces derniers temps.

Je ne peux plus vraiment créer par ingrédient pour l’instant alors je crée par sensations.

Du vide laissé par de nombreux ingrédients a émergé un plein de sensations. Elles deviennent mes nouveaux ingrédients.

J’ai aussi déjà entendu : « à quelque chose malheur est bon »…

Recette de la salade fondante croquante & légère douceur

Ingrédients pour 4 personnes

200 g de vermicelles de soja

8 branches de céleri

8 champignons de Paris

8 crevettes

Coriandre et ciboulette à volonté

2 c à s d’huile de sésame

1 c à c de nuoc mam

1 c à c d’huile de colza

1 demi-citron vert

1/2 c à c de sucre

Recette 

Faire bouillir de l’eau et y plonger les vermicelles pendant 5 minutes

Egoutter, rincer à l’eau froide, réserver

Couper les branches de céleri en tronçons de 2-3 mm

Couper les champignons en deux dans le sens de la hauteur puis en fines lamelles

Faire cuire les crevettes, les décortiquer et les couper en deux dans le sens de la longueur en retirant le fil intestinal

Couper les crevettes en morceaux de 1 cm

Dans un saladier,  mélanger les huiles, le nuoc mam et les condiments

Mélanger tous les ingrédients précédemment travaillés

Ajouter les herbes en superficie avant de servir

 

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Dans une pagode à Saïgon, la doyenne de ma famille me raconte le passé. L’album qu’elle tient est un vestige du passé de ma famille au Vietnam. Je parcours ses pages collantes depuis que je suis enfant. Mes grands-parents y sont jeunes, ma mère, mes oncles et tantes y sont enfants. Ils sont dehors, derrière eux il y a de belles maisons, une belle lumière, de grands arbres, de belles voitures, ils sont beaux, sages, bien habillés. Et elle me raconte leurs vies. A ce moment du voyage, je suis apaisée, je sais qu’une nouvelle page va s’écrire.

Je suis partie au Vietnam il y a quelques temps, en quête de réponses. J’étais en quête d’identité, j’avais un bug d’auto-définition, je tenais en trop ou trop peu de mots, selon les jours, dans mon lexique personnel pour me décréter entière ou réelle.

J’ai commencé par chercher un fil à remonter pour reconstituer l’histoire. Un fil qui ne charrierait pas trop de tristesse, pas trop de silences, pas trop de souvenirs à oublier…un fil qui ne charrierait pas trop l’Histoire.

Et comme le veut l’adage « qui cherche trouve », ce fil s’est imposé à moi. Je remonterais le fil de mon histoire avec la cuisine vietnamienne et plus précisément avec la cuisine vietnamienne des femmes de ma famille.

Il y eut d’abord ce blog, puis les premiers ateliers culinaires qui m’ont permis de donner vie à ce fil, de le sortir des limbes de ma mémoire sensorielle.

Et par un matin froid du 1e jour de l’année du Tigre, la terre m’a appelée. Le hasard, mais les hasards existent-ils, a fait que ce matin-là, Isabelle Rozenbaum et moi avions rendez-vous pour prendre un café. Je vous résume (beaucoup) notre échange:

« – Isabelle, je sais que je vais partir au Vietnam avant la fin de l’année. Je ne sais pas encore quand, ni comment mais je sais que je vais partir.

– Je pars avec toi.

– OK  »

4 mois plus tard, les billets d’avion étaient réservés, et 8 mois plus tard nous décollions pour Saïgon.

Hier matin, dans ma boîte aux lettres, une enveloppe de carton. J’avoue avoir eu envie de filmer l’ouverture de cette enveloppe comme Apple a annoncé le Mac Book Air. Sur « New soul » de Yael Naim. Mais je ne sais pas filmer.

Le livre est là, devant moi. Enfin, dans l’enveloppe. De temps en temps je la touche pour me dire qu’il est vraiment là. Isabelle m’a appelée ce matin pour me dire qu’elle l’avait vu. Qu’il était superbe. C’est beaucoup d’émotion. C’est beaucoup de temps et de chemin parcouru. C’est beaucoup.

Alors j’ai attendu jusqu’au soir que les battements de mon coeur ralentissent un peu et que ma tribu m’entoure pour ouvrir l’enveloppe…

Je n’ai plus qu’une hâte, celle de partager ce livre avec vous. Vivement le 3 avril!

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Je le couve, je le couve depuis des années, des mois et des lunes…

Chaque jour, je me dis qu’il faut que je le lâche, que je le donne, que je lui rende vie…

Il est prévu pour le 3 avril prochain, et comme par superstition je n’ose pas en parler avant qu’il n’arrive. De peur qu’il attrape froid, qu’il ne grandisse pas, qu’il ne vive pas le bonheur que je lui souhaite…

Vous voyez, rien que d’en parler, là, je suis très émue.

Parce que, voyez-vous, ce livre…

…ce livre, est un cadeau que je fais avec l’espoir fou qu’il plaise et la peur incontrôlable qu’il n’y parvienne pas.

Il est mon histoire de descendante d’exilés, d’errance dans l’Histoire, d’amour avec mes origines.

Il est le fruit du hasard, de rencontres, de partages et de mon vécu.

Il est un chant à trois voix dans lequel se croisent et se répondent mon histoire, les photographies d’Isabelle Rozenbaum, et mes recettes de famille.

Il est la suite de mon voyage, qui continue.

Il se nomme « Vietnam exquis, Une cuisine entre Ciel et Terre ».

Il paraît le 3 avril prochain aux Editions de la Martinière.

Et je suis heureuse de vous en parler aujourd’hui. Je reviendrai très vite pour vous en dire davantage.

Quelle que soit la trajectoire de ce livre, je remercie déjà toutes les personnes qui viennent sur ce blog, celles qui sont venues à mes cours de cuisine, celles qui ont assisté aux évènements culinaires de « Linh aux platines ». Vos mots, vos encouragements, votre chaleur a rendu cette incroyable aventure possible.

Alors merci et à très bientôt!

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