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Archive for the ‘Tradition’ Category

Je le couve, je le couve depuis des années, des mois et des lunes…

Chaque jour, je me dis qu’il faut que je le lâche, que je le donne, que je lui rende vie…

Il est prévu pour le 3 avril prochain, et comme par superstition je n’ose pas en parler avant qu’il n’arrive. De peur qu’il attrape froid, qu’il ne grandisse pas, qu’il ne vive pas le bonheur que je lui souhaite…

Vous voyez, rien que d’en parler, là, je suis très émue.

Parce que, voyez-vous, ce livre…

…ce livre, est un cadeau que je fais avec l’espoir fou qu’il plaise et la peur incontrôlable qu’il n’y parvienne pas.

Il est mon histoire de descendante d’exilés, d’errance dans l’Histoire, d’amour avec mes origines.

Il est le fruit du hasard, de rencontres, de partages et de mon vécu.

Il est un chant à trois voix dans lequel se croisent et se répondent mon histoire, les photographies d’Isabelle Rozenbaum, et mes recettes de famille.

Il est la suite de mon voyage, qui continue.

Il se nomme « Vietnam exquis, Une cuisine entre Ciel et Terre ».

Il paraît le 3 avril prochain aux Editions de la Martinière.

Et je suis heureuse de vous en parler aujourd’hui. Je reviendrai très vite pour vous en dire davantage.

Quelle que soit la trajectoire de ce livre, je remercie déjà toutes les personnes qui viennent sur ce blog, celles qui sont venues à mes cours de cuisine, celles qui ont assisté aux évènements culinaires de « Linh aux platines ». Vos mots, vos encouragements, votre chaleur a rendu cette incroyable aventure possible.

Alors merci et à très bientôt!

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 Thai An Van Amersfoort // DESIGN &Qi Concept

Crédit image : Thai An Van Amersfoort // DESIGN &Qi Concept

Le saviez-vous?

Avant de se lancer au galop, le cheval évalue le terrain, trouve son équilibre, secoue sa crinière (non, ça c’est moi qui le dis), et s’élance. Lorsqu’au galop, il connaîtra deux moments magiques : le premier où il n’a plus qu’un sabot au sol pour donner l’élan ultime à tout son corps et le deuxième où les 4 sabots ne touchent plus le sol. Il vole!

Je ne sais pas pour vous, pour moi l’année du serpent s’est vraiment bien terminée mais en queue de serpent, c’est à dire avec des menaces de rechute du côté obscur de la force, avec des menaces de mauvaises surprises, des remises en cause de décisions pourtant actées…Et miraculeusement, tout s’est dénoué de manière encore plus heureuse que prévue. Comme dans Cendrillon. Le serpent est un farceur. Comme dans le Livre de la Jungle.

Cette année du cheval, je la regarde arriver avec circonspection. J’évalue le terrain. Je fais bien attention à mon essentiel : mes amours, mes amis, ma famille, les projets que je porte et que j’aime tant. Tout cela, c’est ma raison d’être.

Comme dans tout galop, il y aura des obstacles : les dévoreurs de temps et d’énergie, les imprévus de la Vie, les questions sans réponse, les prédateurs et les comptes dans le rouge …Comme dans tout galop, ils seront une opportunité de croissance, de changement de point de vue, de dépassement de peurs. Je ne les attends pas mais je sais qu’ils peuvent croiser ma route.

Comme dans tout galop, il y aura aussi des encouragements, de l’énergie et de l’amour en barre. Il y aura de belles rencontres, des témoignages d’amitié, d’amour, d’appréciation et de gratitude. Je ne les attends pas mais je sais qu’ils peuvent croiser ma route.

Comme dans tout galop, il y aura le risque de se perdre, de poser de lourds points d’interrogations. Comme ceux que je vois parfois dans les yeux de personnes que je rencontre. Leur GPS se met à bugger. Elles n’arrivent pas à me situer, je coche quelques cases de leur grille, puis soudain pas les autres :  « le GPS recalcule la destination ». J’espère que le GPS continuera de calculer la destination car je n’en ai pas, j’ai juste un chemin et je l’invente à peu près chaque jour.

Le saviez-vous?

Le Cheval n’est pas un prédateur et dispose pour se défendre de deux atouts : la vitesse et sa tribu. Le cheval sauvage est au paroxysme du danger lorsqu’il s’éloigne seul pour aller se désaltérer. Se désaltérer ce n’est pas qu’étancher sa soif. C’est aussi se poser, laisser passer le poids de la journée, baisser la garde. Le cheval nous enseigne qu’il vaut mieux baisser la garde en compagnie de sa tribu. C’est plus désaltérant.

Alors pour clore mon ouverture de l’année du cheval, je partage la recette que je fais à ma tribu lorsque les moyens du bord sont légers et que la faim est grande. Elle est végétarienne. Cheval oblige!

Du cheval j’aime la fougue, l’élégance, la liberté et la puissance. Puisse-t-il les partager avec nous cette année! J’espère que lorsque cette année sera passée, nous saurons voir le monde plus grand que nous ne le voyons déjà.

Je vous embrasse chers lectrices et lecteurs fidèles ou de passage!

Recette du riz rouge

Ingrédients (4 personnes) :

350 g de riz

1 boîte de concentré de tomates

1 oeuf

1 échalote

1 gousse d’ail

1 cuillère à soupe d’huile

1 cuillère à café de sucre

1 cuillère à café de sel

Recette 

Faire cuire le riz idéalement la veille pour qu’il refroidisse

Eplucher et écraser la gousse d’ail, éplucher et découper l’échalote en tranches dans le sens de la longueur

Dans un fait-tout à feu moyen, faire revenir l’ail et l’échalote dans l’huile

Lorsque l’ail commence à dorer, ajouter le concentré de tomates, le sel et le sucre

Ajouter le riz et mélanger le tout à la spatule jusqu’à homogénéité de la couleur

Battre l’oeuf dans un bol et le verser dans la préparation

Mélanger jusqu’à ce que l’oeuf ait entièrement cuit.

Servir.

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Fin du monde, fin 2012, fin de l’année du dragon… Le début de la fin des fins arrive et ça me donne faim. « Manger et aimer sont les seuls actes qui ne connaissent pas l’érosion du temps » pour résumer ma grand-mère. Comme elle avait raison…

La fin du monde qui n’a pas eu lieu aura été l’occasion d’enterrer une certaine forme de monde, au cas où le 21 décembre 2012 aurait effectivement vu l’avènement d’un monde nouveau. Au-revoir à un monde révolu, confortable et lénifiant, connu et sans horizon, acquis et non conquis.

Pour cela, je me suis retrouvée au Purgatoire, cela ne s’invente pas ; « Linh aux platines » pour une performance culinaire orchestrée par la plate forme de création littéraire et artistique sur le web, D-Fiction. Je vous laisse découvrir la recette d’ogives de carrelet et leur sauce rouge que j’avais créée pour l’occasion.

La fin du monde selon vous-20122012-_HA_0374

Crédit photo : Franck Hamel / http://www.franckhamel.com

La fin de l’année 2012 fut un soulagement, un au-revoir bienvenu à une année qui m’avait autant gâtée qu’elle m’avait pourrie.

La fin de l’année du dragon commence maintenant. Une fin qui commence, c’est un vaste programme qui laisse le temps de formuler des mercis pour l’année écoulée et des voeux pour l’année à venir. L’année du serpent d’eau donc.

Ce soir, j’ai ouvert la porte au génie du foyer, qui comme chaque année va faire son rapport céleste à l’Empereur de Jade, sur nos manquements, nos efforts, nos faiblesses et nos vertus. Il porte avec lui nos mercis et nos voeux, il reviendra dans une semaine avec les auspices que nous espérons les meilleurs.

Comme chaque année, pour que sa parole soit douce et plaide en ma faveur, j’ai mis dans son baluchon un lot de douceurs dont une que j’ai passé la journée à fabriquer. Un dessert doux et chaud à base d’écorces de pamplemousse vert. Une journée à extraire l’amertume de l’écorce pour n’en garder que la douceur.

photo

Transformer l’amertume en douceur est un pari. C’est une histoire d’alchimie avant tout, de patience, de technique mais très peu, et de confiance dans le fait que c’est un phénomène qui existe. Je promets d’en partager bientôt la recette.

Cette semaine sera une semaine de recueillement, de réflexion sur l’année qui vient de s’écouler. Elle va laisser le temps de formuler de vrais voeux, de ceux qui portent un vrai pouvoir de réalisation.

Mes mercis vont vers tous ceux qui sont près de moi, sur mon chemin. Et à vous qui me lisez, m’encouragez, et trouvez dans mes lignes, mes recettes et mes photos quelques secondes de plaisir. Parmi mes voeux, celui de continuer cet échange avec vous.

A très vite pour la nouvelle année.

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Superbe et flamboyance

Telles sont les promesses du dragon à chacun de ses retours.

Il promet une année de risques récompensés, de peurs justifiées mais dépassées, de grandeur et de succès pour tous.

Protecteur et fécond, symbole de puissance, héros civilisateur de la mythologie vietnamienne, le dragon apporte avec son année de nouveaux espoirs de renaissance et de renouveau.

Je vous souhaite de renaître à travers la nouveauté à laquelle vous aspirez, de puiser en vous la force de vivre au plus près de vos rêves et de trouver le chemin qui vous rapproche de vous et de ceux que vous aimez jour après jour.

Tout cela, le dragon vous encourage à l’espérer.

Je l’espère pour vous.

Bonne année du Dragon!

 

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Quintessence

 » Je n’ai jamais voulu travailler le caviar

parce que le caviar n’a rien à raconter dans ma cuisine, 

mais là, en revanche, 

cette concentration marine qu’on trouve dans le nuoc-mâm de grande qualité, 

je n’ai qu’une envie, 

C’est d’utiliser ses saveurs, sa longueur en bouche, son goût légèrement sucré

pour parfumer les légumes, poissons et crustacés de ma Bretagne natale.

Le grand nuoc-mâm, …c’est presque un caviar liquide et grâce à lui,

j’ai l’impression d’avoir désormais une nouvelle note sur ma palette. »

Trois étoiles de mer, Olivier Roellinger

Un peuple nomade par circonstance, une terre bordée d’eau, une nature riche et parfois hostile, la frugalité comme nécessité et parfois comme vertu, plus de 10 siècles de guerres et de migrations, une population de pêcheurs et de montagnards, une ingéniosité issue de la nécessité d’user jusqu’au dernier degré des offrandes de la Nature, une attention méticuleuse à la valeur nutritive de l’alimentation, des bancs de petits poissons foisonnants, des conditions climatiques qui rendent la conservation des aliments risquée, la pauvreté en protéines de l’alimentation de base, le hasard du sel marin qui se dépose sur des poissons qui sèchent au soleil leur faisant restituer un liquide aussitôt recueilli.

Et l’eau de saumure de poisson est ainsi apparue.

Incontournable et emblématique, ce liquide essentiel de la gastronomie vietnamienne bien que répandu reste encore aujourd’hui largement méconnu dans cette partie du monde. Olivier Roellinger l’utilise « pour continuer à écrire en innovant (ses) petites symphonies marines et potagères et esquisser, à travers elles, l’amitié de la France et du Vietnam, de l’Occident et de l’Orient, par delà les douleurs du passé ».

J’aime sa démarche et je lui emboîte donc le pas en vous livrant quelques secrets pas vraiment jalousement gardés pour mieux découvrir ce liquide dont  je pense qu’il est la quintessence de la gastronomie du Vietnam, racontant aussi bien son Histoire que sa géographie.

Qu’est-ce donc?

Il s’agit d’un liquide de couleur brun foncé dans sa version la plus qualitative et pure. Il est issu d’un processus de macération de poissons similaires à des anchois, dans du sel marin. Ce processus s’effectue sur des durées allant de 1 à 3 ans et s’effectue en cuve.

Pourquoi est-ce un produit remarquable?

Sa haute teneur en acides aminés en fait un aliment nourrissant et particulièrement essentiel dans un pays où les protéines restent faibles dans l’alimentation quotidienne. Un bol de riz blanc, une cuillère de saumure et quelques herbes, c’est aujourd’hui encore le repas frugal néanmoins équilibré de nombreux vietnamiens.

Quasiment imputrescible, existant aussi sous une forme pâteuse, il est aisément transportable dans toutes les conditions climatiques et a ainsi accompagné les migrations que le Vietnam a connues dans les périodes de son histoire.

Quels sont les critères de qualité?

L’origine tout d’abord, comme les vins, l’huile d’olive ou le caviar, le nuoc-mâm a une origine contrôlée qui est l’île de Phu-Quoc, au Sud du Vietnam.

Ensuite, son taux de concentration en acides aminés, indiqué en ° dont dépendent son arôme, ses qualités gustatives, les saveurs révélées à la cuisson et ses qualités nutritives. A Paris, je n’ai pas trouvé de titrage supérieur à 35°.

Comment l’utiliser simplement ?

– Pur, en gouttes dans des marinades pour viandes ou légumes mélangé à de l’huile, du sirop d’érable et des graines de sésame

– Préparé pour en faire une sauce d’accompagnement de vos salades, rouleaux de printemps, plats de riz…de la manière suivante :

4 c à s de nuoc-mam pur, 3 c à s de sucre en poudre, 1 jus de citron vert, 1/2 c à s de vinaigre blanc, 8 c à s d’eau. On peut y ajouter selon le goût de l’ail en purée, du piment émincé ou des filaments de gingembre. Rectifier au goût.

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Langue, n.f. : 

1- Organe principal du goût

2- Organe de la parole

3- Manière de parler

4- Moyen d’expression

5- Ensemble des règles qui régissent un idiome

Dictionnaire Littré de la langue française

J’ai entendu parler d’une croyance qui énonce que pour se construire une identité, l’Homme a besoin, d’une terre, d’une langue et d’une filiation. J’y crois assez pour avoir entrepris de dépasser mon analphabétisme en vietnamien, et je me suis retrouvée à nouveau sur les bancs de l’école pour apprendre à lire et écrire dans cette langue dont je n’ai jamais douté de la richesse lexicale et de la subtilité syntaxique. Comme tout analphabète, je comprends la langue mieux que je ne la parle et ne sais ni la lire ni l’écrire de manière compréhensible…

Mettons la faute sur les 11 voyelles et leurs 6 accents toniques, les diphtongues et les prononciations particulières des consonnes :

Récapitulatif sommaire des voyelles, diphtongues et coda en vietnamien

Ce n’est guère plus compliqué que le Russe que j’ai appris il y a longtemps. Si ce n’est que ma pratique du vietnamien oral a ancré un lot de déformations (qu’on appelle localement l’accent du Sud) et me rend presqu’impossible la traduction de ma prononciation dans l’orthographe appropriée…depuis quelques mois, je réapprends à parler avec l’accent « juste », je dois me corriger sans bien savoir comment car personne autour de moi ne parle l’accent « juste ».

Juste pour exemple, je prononce parfois « è » une lettre qui s’écrit « â », je prononce parfois « e » une lettre qui s’écrit « i ». Et ce ne sont pas des cas isolés…

Ainsi, je confonds les voyelles, les accents et les terminaisons des mots. Je me suis retrouvée un peu brouillée, perdue, parfois même découragée…devant mes piètres résultats et minces progrès…

Alors mon professeur (que je recommande chaudement à tous ceux qui veulent apprendre le vietnamien) qui ne manque jamais de ressources et qui comprend très finement les problèmes de ce genre, m’a donné un conseil plein de sagesse. Elle m’a recommandé de faire un lexique avec chaque voyelle en utilisant les mots qui me sont les plus évocateurs de la langue, ceux que j’utilise le plus ou qui me semblent les plus faciles à retenir. Alors j’ai commencé à décliner chacune des 66 combinaisons (11 voyelles, 6 accents toniques) en leur associant des mots évocateurs.

Et voici le résultat :

Un intrus s'est glissé dans chaque colonne...

Puis les mots ont continué d’affluer ainsi…

…me laissant rêveuse quant à la diversité des champs lexicaux à ma portée…

…puis je me suis rendue à cette évidence que la cuisine vietnamienne est ma langue maternelle.

C’est elle la première à m’avoir  parlé de mon pays d’origine. Elle m’a parlé de sa subtilité par ses mélanges habiles de saveurs, de son ingéniosité par l’usage d’ingrédients inattendus, de sa beauté par la richesse de ses couleurs, de sa diversité par ses odeurs, de ses traditions par ses plats incontournables, de sa géographie par sa palette d’ingrédients, de sa douceur par ses textures, de son bon sens par les vertus alimentaires respectées au quotidien, de sa générosité par le nombre de mets apportés dans le repas le plus simple, de sa modernité par sa capacité à user au mieux des ressources locales, de son courage à travers ses nombreux plats qui demandent plusieurs jours et plusieurs mains, de sa spiritualité dans la découverte des mets du sacré, de sa musique dans l’orchestration des repas traditionnels, de sa joie dans la variété de ses desserts et autres entremets.

C’est elle qui a fait naître puis vivre en moi la nostalgie d’un pays où je ne suis pas née. C’est sa voix, ses saveurs qui m’ont rappelé que j’avais des origines vietnamiennes alors que je pensais n’être que d’ici et de nulle part ailleurs.  C’est la vibration des rues de Saigon, la joie des grandes réunions de famille, la lumière de l’Est du monde, les couleurs  du Mékong qu’elle a fondé dans ma mémoire.

Lorsque j’évoque ses saveurs, ses ingrédients, ses secrets, ses merveilles avec tous ceux qui la connaissent, nous parlons des mêmes plats, nous nous reconnaissons à travers les mêmes évocations gustatives, nous nous retrouvons autour des mêmes souvenirs de cuisine familiale.

La cuisine vietnamienne est aussi la langue de ma grand-mère et de ma mère, leur mode d’expression, leur manière de prendre la parole et de raconter. Je préfère cet apprentissage là à tous les cours du monde…

Une dernière preuve, si besoin était…

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« J’ai réinventé le passé pour voir la beauté de l’avenir »

Le fou d’Elsa – Louis Aragon

Cette image fut comme un choc, comme une enfance revenue au galop, comme un pied de nez à mes réactions d’alors, comme un rappel-de moins en moins nécessaire-de mes origines, une réminiscence que je voulais partager ici tant elle illustre mon propos.

Elle contient en elle une multitude de symboles qui parlent de ma cuisine de famille.

Au Vietnam, la cuisine se déguste souvent accompagnée de nuoc-mam (eau de saumure de poisson) et d’une large quantité d’herbes aromatiques, basilic, pérille, menthe, coriandre, ciboule et nombre d’autres. La sauce nuoc-mam apporte une touche salée, sucrée, acide, piquante. Les herbes apportent tour à tour une aspérité, une astringence, une douceur, une note fraîche, une note poivrée, du craquant, du contraste ou de la complémentarité avec les plats qu’elles accompagnent. Leur rôle dans la qualité gustative est si important que je renonce parfois à cuisiner certains plats si elles viennent à manquer.

De même, il m’arrive fréquemment de les faire entrer dans des repas où elles n’ont en théorie pas leur place.

Alors j’évalue chaque tige, sélectionne quelques feuilles souvent de même taille, les détache doucement de leur tige pour ne pas les abîmer, superpose plusieurs feuilles au bout de mes doigts, avant de les émincer à la main puis en parsème mon bol ou mon assiette un peu au hasard tout au long du repas, pour créer à chaque bouchée une nouvelle saveur…

C’est un geste mécanique, évident, naturel et indispensable.  Qui me révèle  à mes origines, et me rattache par mimétisme aux gestes maternels.

C’est une réminiscence car enfant, j’étais impressionnée et je l’avoue aujourd’hui, un peu gênée par le bazar autour de son bol à la fin de chaque repas. Des tiges d’herbes nues, que je voyais alors comme autant de déchets…jusqu’à ce jour-là où j’ai cru qu’elle avait dîné à la maison. Les effluves astringentes du nuoc-mam se mêlaient à celle des herbes, vision et odeur familières, créant un cocon sensoriel que j’étais heureuse d’avoir réinventé.

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…me dit-Elle alors que nos mains étaient plongées dans la réalisation d’un mets où patience et précision le disputaient à l’expérience et l’habileté. Sa réflexion a éveillé mes souvenirs d’ « avoir ou être » d’Erich Fromm. Il ne suffit pas d’avoir des enfants pour être parents, d’avoir du talent pour être artiste, d’avoir accumulé pour être riche, ou plus simplement d’avoir pour être.
A un certain stade de mon travail de mémoire,  j’ai eu le réflexe un peu académique et rassurant d’accumuler par le nombre : écrire les recettes familiales, maîtriser les techniques, écouter les histoires petites et grandes, découvrir les récits d’hier, comprendre les théories autour de l’alimentation, la transmission et le goût, effectuer des recherches sur le rôle de la cuisine dans la culture vietnamienne, empiler les ouvrages culinaires…
Pour arriver au constat que même en maîtrisant le grand livre de la Cuisine d’un chef triplement étoilé, je ne serai jamais ce chef triplement étoilé.
Alors entre la théorie pure et parfaite et ce qui arrive aux doux palais de nos bien-aimés?
Entre les deux, la transmission, l’appropriation, les essais multiples sans chance de débutant, le plaisir de se lancer sans connaître le résultat, la crainte de n’être pas à la hauteur, et surtout une envie inaltérable de continuer à faire vivre sa propre idée du goût.
Peut-on fidèlement répliquer une recette? La part de soi qu’on y met n’altère-t-elle pas avec le temps celle qui nous a été transmise? La manière dont nous la transmettons n’ajoute-t-elle pas un écart avec celle que nous avons reçue?
Le goût de nos mères deviendra-t-il le nôtre pour nos enfants?
A quels détails tient le fil ténu qui rattache une recette au patrimoine gastronomique familial?
En ce qui me concerne, il tient à la mémoire des échanges, aux tendres souvenirs de mains qui se croisent et se touchent dans le travail d’une pâte, à un ustensile tendu vers moi « pour voir si j’ai vraiment compris », à un regard qui évalue avec bienveillance, à des phrases presqu’anodines qui contiennent parfois tout le secret, à la confiance qui m’est accordée que je maintiendrai le savoir-faire vivant.  Alors au-delà de la technique, de la chimie des éléments, et des gestes pesés et mesurés, l’émotion ravivée devient mon meilleur guide, traçant le chemin jusqu’à la table.

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…me dit une amie alors que nous étions en train de composer le menu du Nouvel An vietnamien / chinois. Je dois avouer que je ne savais pas trop à quoi m’attendre mais la seule perspective de pouvoir partager avec elle une recette traditionnelle de sa mère me suffisait amplement.

Nous nous sommes donc retrouvées à cuisiner ce repas de Nouvel An et j’étais assez émue de la voir parcourir ses souvenirs, pour retrouver les bonnes proportions de chaque ingrédient, pour s’assurer que les recommandations qu’elle avait entendues plusieurs fois, sans qu’elle y prête vraiment attention, avaient bien été respectées. J’étais honorée d’assister à « la première fois qu’elle fait ces raviolis elle-même ». Je sais et j’apprécie la valeur de tous ces gestes reproduits par la mémoire et l’affection.

Ce que je ne savais pas, c’est l’engouement que ces raviolis auraient sur ma maisonnée, moi y compris.

Mes préjugés sur les raviolis frits ont été totalement renversés.

Préjugé 1 : Ce n’est pas que de la viande

C’est de la viande certes, mais avec une poignée de chou blanc haché, une cuillère à soupe de gingembre frais émincé, une cuillère à soupe de feuilles de ciboule, une cuillère à soupe de crevettes séchées pilées, quelques pincées de sel, sucre, poivre, sauce d’huître, sauce soja et un filet d’huile de sésame. Un vrai bouquet :

Préjugé 2 : Ils n’ont pas de formes et sont assez compliqués à former

Le talent est dans le détail :

Préjugé 3 : ils sont frits dans l’huile

La cuisson des raviolis maison est subtile. On commence par faire frire le ravioli sur sa base pendant 30 secondes. Puis on rajoute 5 mm d’eau et on couvre pendant 3 min pour que la cuisson se fasse à la vapeur. Puis on retire l’eau et on laisse le ravioli frire sur sa base pendant 30 secondes. C’est prêt : les raviolis sont cuits à l’intérieur, fondants et juste craquants sur un côté…

Pauline retire l’eau de cuisson avant la dernière étape

Le meilleur accompagnement est une sauce soja et des feuilles de ciboule émincées et du piment.

La vapeur d’eau fait « luire » les raviolis

Quelques précisions :

  • Les enveloppes à raviolis se trouvent dans le rayon surgelés des épiceries asiatiques.
  • Les ingrédients sont mélangés à la main, ce qui donne une texture plus soutenue que si tout était mélangé au robot
  • Les poignées, cuillerées et pincées cités dans la recette correspondent à 400 g de viande hachée environ
  • Voici comment on peut occuper les enfants pendant ce temps :

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Le 23 ème jour du 12ème mois lunaire, le génie du foyer (Ông Tao), aussi connu comme génie de la Cuisine, qui veille sur la prospérité des familles et des cuisines, rend une visite céleste à l’Empereur de Jade.

Il dispose d’une semaine avant le Têt, le nouvel an vietnamien, pour lui faire état de ce qu’il a observé dans les foyers.

Puis la veille du nouvel an, il sera de retour, apportant avec lui d’auspicieux augures.

Chevauchant une carpe, dans des vêtements flambant neufs, le génie du foyer part avec beaucoup de mets sucrés dans sa besace, pour adoucir ses propos….

Il a aussi dans sa poche un parchemin avec tout ce qu’il doit bien penser à raconter. Cependant, s’il lui venait l’idée improbable d’avoir des propos autres que dithyrambiques, j’ai prévu une douceur irrésistible à base de …riz gluant, pour lui coller la langue au palais :

Che Xoi Nuoc

Pour vous, la recette de ce dessert indécemment chaud, bon, doux et réconfortant. Il s’agit de petits gâteaux de riz gluant fourrés à la purée de haricots mungo, baignant dans une infusion de gingembre au sucre de canne.

Ingrédients pour 6 personnes :

Pour les gâteaux :

400g de fraine de riz gluant

35 cl d’eau

1 pincée de sel

150g de haricots mungo

1 cuillère à café de sucre

Pour l’infusion :

300 g de sucre de canne roux

1,2L d’eau

1 morceau de gingembre de la taille d’un oeuf

Pour le nappage au coco

400 cl de lait de coco

1 c à s de sucre

Recette :

Pour la purée de haricot mungo :

Faites tremper le riz et les haricots dans l’eau pendant une heure

Rincez les haricots mungo et  faites-les cuire à la vapeur 20 min. Pour cela, une couscoussière ou un cuit-vapeur sont parfaits.

Ajoutez le sucre et écrasez-les à la fourchette pour les réduire en poudre.

Faites des billes de 2 cm de diamètre, mettez de côté

Pour les gâteaux :

Versez l’eau et le sel dans la farine de riz, mélangez avec les doigts jusqu’à obtention d’une pâte homogène. Laisser reposer une heure ou deux au réfrigérateur.

Puis faites des billes de 2,5 cm de diamètre. Vous devriez pouvoir en faire 12.

Aplatissez ces billes en un disque de 0,5/1 cm d’épaisseur. Posez la bille de haricots mungo au centre puis refermez la gâteau de riz gluant de manière à recouvrir la pâte de haricots mungo.

Avec le reste de pâte de riz, faites des petites billes de 1 cm de diamètre.

Faites bouillir de l’eau : plongez vos gâteaux et les billes en 3 bains pour éviter qu’ils ne se collent. Lorsqu’ils remontent à la surface, vous pouvez les sortir de l’eau et les plonger dans l’eau froide.

Pour l’infusion :

Faites bouillir l’eau avec le sucre et rajouter le morceau de gingembre épluché et écrasé.

Réservez

Ajoutez les gâteaux cuits après leur bain d’eau froide dans l’infusion.

Laissez le tout reposer le plus longtemps possible pour que le goût du gingembre s’infuse dans les gâteaux.

Pour le nappage au coco :

Faites réduire le lait de coco d’un tiers sur feu moyen.

Ajoutez le nappage par dessus le dessert juste au moment de servir .Vous pouvez aussi ajouter des graines de sésame.

Comment dire du mal après cela, n’est-ce pas?

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